23 août 2020

Prise en charge d’un patient COVID-19 + ou symptomatologie évocatrice au bloc opératoire

Par admin

1.    Rappels :

Les recommandations émises à ce jour vont être amenées à évoluer en fonction des connaissances sur les moyens de propagation et contamination du virus.

●      Définitions

  • Un patient infecté est défini comme un sujet ayant un prélèvement nasopharyngé positif par PCR
  • Un patient suspect est défini comme un sujet ayant des symptômes évocateurs (définitions actuelles : fièvre ≥38°C ou toux ou dyspnée fréquence respiratoire >22/min) et des critères d’hospitalisation (pneumopathie hypoxémiante ou comorbidités sévères). Cette définition très large a pour objectif de ne pas manquer de patient contaminé et d’éviter la dissémination virale parmi la population et les soignants.

●      Contamination

La contamination se fait principalement par voie aérienne (risque « gouttelettes ») et par contact. Le risque de transmission inter humaine est élevé.

L’utilisation d’un masque dit « chirurgical » est suffisante pour approcher les patients mais pas en cas de soins au patient infecté, en particulier au bloc opératoire et notamment en salle d’intervention, car le COVID-19 présente un gros risque d’aérosolisation nécessitant donc l’utilisation de masques FFP2 lors de tout acte invasif.

Plusieurs moments critiques dans la prise en charge au bloc opératoire :

  • Intubation et extubation par proximité immédiate de la zone source de contamination = sphère ORL donc masque
  • Temps chirurgical (acte invasif) en contact avec des zones potentiellement contaminantes par aérosolisation, quid des fumées chirurgicales, quid de la cœlioscopie, de la chirurgie laser, risque majeur de projection de liquides biologiques… donc masques.

Le dossier patient, s’il doit rentrer en salle, sera protégé dans une pochette en plastique transparente qui sera nettoyée – désinfectée après utilisation, avant sortie de salle, avec une lingette désinfectante. 

2.    Prérequis :

  • Avoir une salle dédiée dans la mesure du possible qui sera identifiée avec une affiche
  • Concernant la pression de la salle une petite explication utile donnée par P.BREACK expert en conception et hygiène hospitalière =

« La pression est obtenue en modifiant le volume d’air repris, par exemple :

  • Si on souffle 5 000 m3 et qu’on en reprend 5 000, la pression est de 0 ou iso pression (à ne pas confondre avec le classement ISO des salles)
  • Si on souffle 5 000 m3 et qu’on reprend 4 500 m3 par le système d’extraction, il reste 500 m3 qui créent la surpression et cet air en trop part dans le couloir par les joints de porte. C’est pour cela qu’il est préférable d’avoir un sas car il protège le couloir d’une éventuelle contamination à partir de la salle. Cela fonctionne aussi dans le sens inverse et le sas protège la salle de la contamination du couloir quand on ouvre la porte.
  • Si on souffle 5 000 m3 et qu’on reprend 4 200 m3, la suppression est plus forte, elle se mesure en Pascals et en général, elle est de 15 Pascals (Pa) entre la salle et le sas et 15 Pa entre le sas et le couloir.
  • Si on souffle 5 000 m3 et qu’on reprend 5 500 m3, on crée une dépression dans la salle qui aspire dans ce cas l’air du couloir, d’où l’intérêt du sas.

Donc, si on dispose d’un sas, on peut mettre la salle en dépression sans risque pour le patient

Si on ne dispose pas de sas (malheureusement situation fréquente) on doit mettre la salle en iso pression (pression 0) et garder les portes fermées pendant toute l’intervention ».

  • Vider la salle de tout matériel non nécessaire
  • Prévoir un nombre minimum de personnes pour la prise en charge
  • Préparation et vérification du matériel IBODE/IDE et chirurgien : prévoir pour toute chirurgie un bistouri à aspiration de fumée si possible – des sachets plastiques pour les DM et pour les prélèvements – des lingettes à UU prêtes à l’emploi – prévoir un drap supplémentaire en cas de souillure à l’extubation – prévoir 1 ou 2 bacs de pré désinfection rempli et 1 réservé pour les paires de lunettes de protection et ballon IADE  Les disposer au plus près de l’ouverture de la porte.
  • Prévoir personnel (AS, IBODE ou IDE) en soutien devant la salle pour aller chercher du matériel

3.    Accueil du patient :

  • Sas débarrassé du matériel non nécessaire 
  • Le patient part de sa chambre au bloc impérativement avec un masque chirurgical (à élastique de préférence, plus facile à mettre), en brancard si possible (plus facile à nettoyer qu’un lit)
  • Prise en charge du patient par une équipe dédiée après procédure d’habillage (sur-chaussures friction SHA, port de 2 articles coiffants : cagoule + calot, masque FFP2 et test fit-check attention pas de barbe car pas d’étanchéité, casaque manche longue, tablier plastique, gants non stériles en nitrile, lunettes de protection).
  • S’assurer que les couloirs sont libres de toutes personnes dans la mesure du possible.
  • Patient acheminé sans temps mort sur un brancard ou son lit jusqu’en salle d’intervention. Après transfert sur la table en salle, le linge est évacué dans des sacs dédiés, le brancard ou le lit sera décontaminé et mis en attente devant la salle d’intervention.
  • La check-list sera faite en salle d’intervention.

4.    En salle d’intervention :

  • Les portes sont maintenues fermées
  • Le personnel en salle, limité au minimum, n’en sort qu’à la fin de l’intervention
  • Intubation avec MAR et IADE
  • L’équipe chirurgicale rentre après l’intubation dans la mesure du possible
  • Limiter les conversations 
  • Se servir de l’interphone ou autre moyen pour communiquer avec l’extérieur
  • Prélèvements biologiques : le contenant doit être lavé avec une lingette désinfectante en salle, et mis en sachet (pour l’envoi au labo, voir protocole spécifique à chaque établissement)
  • Si possible, sortie du personnel non indispensable lors de l’extubation.
  • Doivent rester 3 personnes IADE +MAR +1 pour le transfert avec dispositif de transfert
  • Réveil complet en salle d’intervention avec état stable avant transfert en service ou retour direct intubé-ventilé en réanimation
  • Le chariot ou lit est poussé à l’intérieur de la salle ainsi que les bacs de décontamination
  • Transfert du patient avec dispositif de transfert
  • Pose d’un masque chirurgical au patient dès extubation avant sortie de salle

5.    Après l’intervention :

  • Élimination des coupants, tranchants et piquants en salle.
  • Immersion des ancillaires dans les bacs de décontamination
  • Élimination du matériel souillé en fonction du protocole établi avec service de stérilisation, le plus rapidement possible
  • Tous les déchets = DASRI et restent en salle : sacs jaunes fermés.
  • Dispositifs médicaux réutilisables non utilisés seront nettoyés-désinfectés et sortis après la fin de l’entretien de la salle. Les dispositifs médicaux à usage unique excédentaires seront éliminés dans les DASRI s’ils n’ont pas été protégés dans des sachets par exemple (attention au gaspillage)
  • Déshabillage du personnel près de la sortie en enlevant la tenue par couches successives et sous contrôle d’un collègue :
  • Changement de gants : les gants à manchette peuvent être remplacés par des gants vinyle
  • Retirer le premier article coiffant,
  • Enlever le tablier en tirant dessus,
  • Enlever la blouse et les gants
  • Friction SHA, gants vinyle
  • Retirer les lunettes de protection en les prenant par les branches
  • Enlever le masque FFP2 précautionneusement
  • Enlever les sur chaussures avant de sortir de salle
  • Se laver immédiatement les mains et les avant-bras
  • Aller au vestiaire et changer de tenue.

Ce déshabillage sera effectué sans précipitation, sous contrôle d’un collègue car le risque de contamination est maximal à ce moment-là.

6.    Sortie de salle :

  • Le personnel non nécessaire au réveil et à l’extubation du patient sort de salle après déshabillage, puis remettra une casaque manches longues + tablier plastique + gants manchettes longues Nitrile (équipement complet) en attendant la sortie de salle du patient
  • L’équipe anesthésique accompagne le patient jusqu’à la porte de sortie de la salle.
  • Le personnel qui attend derrière la porte, réceptionne le patient et le raccompagne vers la sortie du bloc
  • Retour patient directement dans le service d’origine ou Réanimation SANS passage en salle de surveillance post-interventionnelle

7.    Entretien de la salle :

  • Si une seule intervention prévue : réaliser un bio nettoyage complet 4 temps avec produits détergents-désinfectants avec équipement de protection individuelle (EPI) complet.
  • Si plusieurs interventions, réaliser un essuyage humide de toute la salle avec produits détergents-désinfectants, procéder à un bio nettoyage complet en fermeture de salle à la fin de l’entretien de la salle.

Le temps de latence entre deux interventions dépendra des performances de ventilation de la salle et de son volume. Se conformer aux recommandations de vos établissements en matière de renouvellement d’air des salles.

Conclusion :

La haute contagiosité de ce virus exige donc que toute personne évoluant au bloc opératoire se conforme strictement aux précautions complémentaires d’hygiène indispensables à sa non-propagation.

Par principe de précaution il faut en conclure que tous les intervenants d’une salle d’intervention doivent porter un masque FFP2.

Le patient ne doit pas passer par la salle de surveillance post-interventionnelle car le risque de contamination y est important et elle est très difficile à désinfecter réellement.